Écouter avec sa troisième oreille
En général, toute musique comporte trois éléments de base : la mélodie, le rythme et l'harmonie. Quand je compose la musique d'une chanson, la mélodie peut me venir très spontanément dans ma tête. Ou alors, à partir de quelques accords à la guitare ou au piano, plusieurs mélodies peuvent émerger tout aussi spontanément selon le tempo ou le rythme qui les soutient. C'est en écoutant avec ma troisième oreille que j'arrive à harmoniser le tout. La troisième oreille est celle du coeur ou du « feeling » ou de l'énergie (douce ou forte) que l'on veut donner à la chanson.
Ne possédant aucun diplôme en composition, je ne suis parvenu à écrire qu'une seule partition musicale : ô ou la troisième oreille pour choeur mixte et tempura. Grâce aux judicieux conseils de Walter Boudreau, j'ai pu écrire sur papier à musique, toutes les notes de cette oeuvre interprétée par des membres du Choeur de l'OSM. Il fallait être culotté pour s'embarquer dans une telle aventure. Mais comme la musique contemporaine appuie souvent ses assises sur des calculs mathématiques, j'y avais eu recours.
Musicien autodidacte et compositeur autodidacte, toutes mes musiques, sauf ô ou la troisième oreille, je les ai composées directement sur le clavier, la guitare, la trompette, le sifflet ou le fluguelhorn avec l'aide d'enregistreuses multi-pistes et de l'ordinateur. Avec l'aide aussi de plusieurs autres compositeurs qui eux, savent écrire des partitions à partir de mes enregistrements.
Bien que ne sachant pas écrire la musique, j'ai composé la musique d'environ 75 % des chansons de mes 15 disques, dont La Bittt à Tibi que Claude Vivier, l'un des plus grands compositeurs de musique contemporaine québécoise a annoté sur papier musique. Comme on dit, je joue « à l'oreille ». Mais l'oreille, ça je l'ai. Ayant fait l'écoute de la plupart des styles musicaux de la plupart des cultures actuelles, classiques et anciennes, mon école, ma seule véritable école a toujours été l'écoute précise et subtile des oeuvres des autres. Ceci à un point tel que j'ai écrit un livre intitulé Musiques du Kébèk en 1971, lequel consistait en une synthèse de toutes les musiques qui se pouvaient entendre au Québec à cette époque.
C'est aussi de ma faculté d'écouter tous types de musique que m'est venu le goût d'improviser vocalement et instrumentalement. Bref, en tant que compositeur, les dix doigts de mes deux mains sont lents à trouver les bons accords, les belles mélodies et les bons rythmes, mais mon esprit est leste et preste à en reconnaître la pertinence, la justesse et la beauté.